Dans "exercices de style", livre paru en 1947, Raymond Queneau raconte 99 fois, de 99 manières différentes une brève histoire :
Le narrateur rencontre dans un bus un jeune homme au long cou, coiffé d'un chapeau mou orné d'une tresse tenant lieu de ruban. Celui-ci échange quelques mots assez vifs avec un autre voyageur, puis va s'asseoir à une autre place. Un peu plus tard, le narrateur revoit le même jeune homme  en train de discuter devant la gare Saint Lazare avec un ami qui lui conseille d'ajuster (ou d'ajouter) un bouton de son pardessus.
ce qui donne, par exemple :


 Ampoulé. 
 
À l'heure où commencent à se gercer les doigts roses de l'aurore, je montai tel un dard rapide dans un autobus à la puissance stature et aux yeux de vache de la ligne S au trajet sinueux. Je remarquai, avec la précision et l'acuité de l'Indien sur le sentier de la guerre, la présence d'un jeune homme dont le col était plus long que celui de la girafe au pied rapide, et dont le chapeau de feutre mou fendu s'ornait d'une tresse, tel le héros d'un exercice de style. La funeste Discorde aux seins de suie vint de sa bouche empestée par un néant de dentifrice, la Discorde, dis-je, vint souffler son virus malin entre ce jeune homme au col de girafe et à la tresse autour du chapeau, et un voyageur à la mine indécise et farineuse. Celui-là s'adressa en ces termes à celui-ci : «Dites-donc, vous, on dirait que vous le faites exprès de me marcher sur les pieds !» Ayant dit ces mots, le jeune homme au col de girafe et à la tresse autour du chapeau s'alla vite asseoir. 
 
Plus tard, dans la Cour de Rome aux majestueuses proportions, j'aperçus de nouveau le jeune homme au cou de girafe et à la tresse autour du chapeau, accompagné d'un camarade arbitre des élégances qui proférait cette critique que je pus entendre de mon oreille agile, critique adressée au vêtement le plus extérieur du jeune homme au col de girafe et à la tresse autour du chapeau : «tu devrais en diminuer l'échancrure par l'addition ou l'exhaussement d'un bouton à la périphérie circulaire.» 
 
Vulgaire. 
 
L'était un peu plus de midi quand j'ai pu monter dans l'bus. Je monte donc, j'paye ma place comme de bien entendu et voilàtipas qu'alors j'remarque un zozo l'air pied, avec un cou qu'on aurait dit un télescope et une sorte de ficelle autour du galurin. Je l'regarde passque j'lui trouve l'air pied quand le voilàtipas qu'i's'met à interpeller son voisin. Dites-donc, qu'il lui fait, vous pourriez pas faire attention, qu'il ajoute, on dirait, qu'il pleurniche, qu'vous l'faites essprais, qu'i bafouille, deummarcher toutltemps sullé panards, qu'i dit. Làdessus, tout fier de lui, il va s'asseoir. Comme un pied. 
 
Jrepasse plus tard Cour de Rome et jl'aperçois qui discute le bout de gras avec autre zozo de son espèce. Dis-donc, qu'i lui faisait l'autre, tu dvrais, qu'i lui disait, mettre un ottbouton, qu'il ajoutait, à ton pardingue, qu'i concluait. 


 
 

A votre tour, racontez l'histoire suivante en utilisant différents styles, par exemple journalistique, poétique, énigmatique, interrogatif, humoristique, en alexandrins,ampoulé, vulgaire... :

C’est une paire de chaussures. Elle sont usées, craquelées. Rangées dans le bas d’un placard. On les retrouve plus tard au bord de l’eau, sur la plage. La mer monte. Elles disparaissent. Un homme regarde la mer, les pieds nus.