Ecrire avec ses cinq sens, deuxième proposition
12 avr. 2019
Par carole lacheray - Ecrire dans tous les sens, deuxième proposition - Lien permanent
Aveugle...
Voici le tableau « déjeuner sur l’herbe » d’Edouard Manet
Racontez la scène du point de vue de la baigneuse en imaginant qu'elle est aveugle.
Commentaires
Il fait chaud.
BrigitteJe les entends papoter tranquillement. Ils s’extasient sur la saveur des mets. C’est vrai que les cerises m’ont laissé une agréable empreinte juteuse et sucrée qui persiste malgré l’eau qui m’éclabousse.
Il fait chaud.
La fraicheur de l’eau me murmure des mots tendres et apaise mes pieds griffés. Elle me caresse délicieusement tout le corps.
Les odeurs, âcre de la verdure, gourmande des fruits, croustillante du pain, suave de la source se mélangent au parfum entêtant d’Edgar. Dommage, il masque la senteur voluptueuse que dégage la peau mouillée de Berthe. Elle a tant de charme Berthe, je la sais belle, chaleureuse, forte, sa voix me l’affirme.
Emile me manque, j’aimerais son corps près de moi dans ce bain champêtre. Il me chanterait du bel canto et me rendrait plus sereine.
L’eau caresse mes jambes, je l’effleure délicatement du bout des doigts.
HeylietteLa conversation de mes compagnons me parvient en un doux murmure. Je sais qu’ils sont assis sur l’herbe, tous les trois, pour prendre part au repas.
L’odeur du poulet que Jules, qui l’a cuisiné, doit être en train de découper, me fait plisser le nez de satisfaction. Je salive déjà.
L’eau est un peu fraîche aujourd’hui, j’aurais cru qu’au mois de septembre, elle serait meilleure que ça. J’aime tellement me baigner dans cette rivière ! Y reviendrons-nous encore d’ici la fin de l’année ? Les galets glissent sous la plante des pieds, c’est la mousse qui les rend gluants. Je m’asperge le visage et goutte l’eau dans ma paume. Un goût de vase infime. La source n’est pas loin, l’eau est pure ici. Je renifle mes doigts, reconnais l’astringence de la marne, l’acidité des plantes aquatiques. Ils se moquent toujours de moi quand ils me voient faire cela. « Continues comme ça et tu vas brouter les nénuphars ! » s’exclame Édouard, mais je sais qu’il n’est pas méchant. Je les entends s’amuser tous les trois, Émile aime bien faire rire Eugénie. Le repas est terminé, mais le fumet des petits pains flotte encore dans l’air. J’ai la chair de poule, il est temps de sortir de la rivière, marcher sur l’herbe tendre et rejoindre le groupe.
Isa Lebastard
Isa Lebastard