Un cadeau de Noël...
28 nov. 2020
Par carole lacheray - un cadeau de Noël... - Lien permanent
Je vous propose cette fois ci d’écrire un texte du point de vue d’ un narrateur externe.
Il semble finalement que nous allons pouvoir fêter Noël…mais en comité restreint !
Qu’à cela ne tienne, hauts les cœurs, il est grand temps de penser aux cadeaux puisque la tradition nous y invite. Cadeau inspiré, cadeau empoisonné, cadeau modeste ou cadeau insensé, chaque année c’est le même casse tête pour deviner ce qui ferait plaisir ou enrager ( cela peut arriver….) la personne à qui l’on offre.
Je vous propose cette fois ci d’écrire un texte du point de vue d’ un narrateur externe. Le narrateur externe raconte ce à quoi il assiste, ne connaît des personnages que ce qui peut se voir de l’extérieur. il nous invite à assister au spectacle avec lui.
Votre narrateur nous raconte la réaction d’un personnage découvrant son cadeau le soir de Noël. Cadeau plaisir, cadeau mesquin, cadeau vengeance, ridicule, grandiose ou très surprenant. Faites durer le suspens, permettez -nous d’assister à ce qui peut être un spectacle émouvant, drôle ou pathétique et ne dévoilez qu’à la fin de votre texte la nature du cadeau, ou laissez nous deviner…
Commentaires
Bizarre de se trouver ici. Je ne connais personne, ou presque. Pourquoi cette famille unie et chaleureuse m'a-t-elle invité, moi l'irréductible solitaire, limite misanthrope ? Je n'ai pas l'impression qu'ils soient très religieux, mais l'idée de bonne action pour Noël est tenace.
BrigitteEt si je compte bien, nous sommes 14. Être 13 insupportait sans doute certains, les superstitions sont tenaces.
Ils sont là autour du sapin, élégamment décoré. La lumière est douce. La table a été sommairement débarrassée. Des paquets aux papiers colorés attendent sagement leur destinataire. Une fébrilité joyeuse plane. L'échange de cadeaux est tenace.
Je me mets un peu de côté, je suis arrivé simplement avec un pot d'azalée, des macarons et deux bouteilles de champagne. Je les regarde, tous. La grand-mère (délicieuse octogénaire) reste assise, ses filles ( sympathiques quinquagénaires) finissent de débarrasser et préparent infusion et liqueur. Les maris debout font vaguement le relais des tasses et des verres. Un autre prend des photos. Une jeune ado donne un coup de balai rapide. Les petits enfants jouent au Père Noël, un bonnet ridicule sur la tête. Un arrière petits fils (garçonnet d'une dizaine d'années) est assis en tailleur 2 paquets à ses côtés, qu'avec impatience il commence à ouvrir.
Je les trouve beaux, et un regret me traverse. Mes parents sont morts, ma sœur est à l'autre bout du monde, mes enfants oublient souvent mon existence. Leur mère vie sa vie au côté d'un autre sans doute plus agréable que moi.
Et c'est alors que je le remarque, un grand adolescent attardé, discret, gracile. Il est habillé tout de noir, avec une pochette rouge à sa chemise, et un petit foulard vert autour du cou. Bizarrement il n'est pas ridicule, juste « autre ». De qui est-il le fils ? Où alors est-ce un invité extérieur, comme moi ?
Il regarde une pochette dorée avec étonnement. Il semble réfléchir, vouloir prolonger le mystère. Un sourire dubitatif éclaire son visage. Visiblement, il n'est pas pressé. Tout ceci pique ma curiosité. J'ai envie de m'approcher, de lui parler, mais je n'ose pas. Je ne crois pas qu'il apprécierait. Je ne veux pas me montrer intrusif, mais je ne le quitte pas du coin de l’œil. Des cris fusent, des embrassades commencent, des échanges étonnés ou déçus . Mais, lui reste immobile sur un petit tabouret, la pochette à la main. Il semble tellement concentré et extérieur à l’excitation ambiante que je suis de plus en plus curieux de voir ce que cache cette pochette dorée. Personne ne semble faire attention à lui, à part moi. Toupie la petite chatte malicieuse saute sur ses genoux. Il l’accueille avec une caresse et la laisse se pelotonner sur ses genoux. Je me fais de moins en moins discret pour l'observer, à tel point qu'il me remarque, me regarde et me sourit.
- Elle est belle cette pochette, non ? Je me demande ce qu'elle contient. Elle est petite, mais je crois que le contenu est grandiose. J'ai plusieurs idées, je voudrais être sûr de trouver tout seul ; ça me porterait bonheur.
Je l'écoute sidéré, et charmé. Sa voix est douce, son regard rêveur. Il dégage cependant une grande force.
- Vous voulez l'ouvrir pour moi ? Ou alors, toi, Toupie ? Vous ne voulez pas ? C'est normal.
Et il se lève, délicatement, au grand mécontentement de Toupie. Il garde sa pochette à la main pour se mêler aux autres. Il échange des propos aimables, s’extasie, rit, sourit, toujours la pochette dorée à la main. Il s'assied à côté de la grand-mère, pose sa pochette sur l'accoudoir du fauteuil, lui verse une tasse d'infusion, puis s'en verse une. Ils parlent doucement, une grande complicité les lie. Je la vois poser des questions, remuer la tête en regardant la pochette. Lui secoue ses cheveux bouclés, sourit malicieusement, dépose un baiser furtif sur le front de la vieille dame, puis saisit la pochette. Lentement, très lentement, il l'ouvre, la tend à la veille dame qui refuse de la prendre. Je comprends qu'elle sait parfaitement ce que contient cette pochette dorée.
Je suis aussi impatient que si ce présent m'était destiné. Le bel inconnu doit le percevoir, il échange un regard amusé avec moi, puis enfin sort de la pochette une feuille qu'il lit à voix basse à l'oreille de la vieille dame. Ils sont émus. Enfin, il se lève, il me paraît soudain très grand. Il frappe dans ses mains, demande le silence avec autorité.
- Merci, merci à vous tous. Grâce à vous je vais pouvoir ouvrir mon espace culturel,notre espace culturel. Vous y serez toujours les bienvenus.
Sa voix se brise, il éclate en sanglots. Tous s'approchent, l'entourent, l'enlacent, l'embrassent l'encouragent. Et moi discrètement je m'éclipse. En cherchant mes clés, je trouve un papier dans ma poche. « Vous saurez si j'ai bien deviné et si je peux doublement me réjouir. Je pense qu'ils me font me faire propriétaire et gestionnaire de la gentilhommière du bord du Loir où je souhaite ouvrir un grand espace culturel. Sauriez-vous m'y aider ? »
FETES DE NOEL
Il y a une petite quarantaine d'années de cela, nous allions passer Noël dans le Nord
chez le frère de mon mari.
Ma fille n'était pas vraiment d'accord, elle avait peur que le Père Noël ne nous retrouve pas si nous n'étions pas chez nous, mais après maintes explications elle
avait fini par nous croire lorsque nous lui disions qu'il savait toujours où on était.
En arrivant à destination nous cachions les cadeaux où nous pouvions.
Vers 21 heures nous couchions les enfants ils ne devaient pas voir le Père Noël, et nous entamions notre repas.
A minuit après un réveillon bien arrosé et les cadeaux installés au pied du sapin
nous sommes allés réveiller les enfants "le Père Noël était passé".
Ma petite puce encore toute endormie mais bien décidée, ne fut pas longue à trouver ses cadeaux : poupée, dinette et j'en passe et enfin cette tenue de majorette qu'elle
espérait tant.
Drame !!! le Père Noël avait oublié les bottes blanches ! Ce costume sans les bottes
n'avait aucun interêt pour elle.
Nous étions affolés, où étaient passées ces bottes, nous étions sûrs et certains des les avoir apportées ! Mille et une raisons nous sont parvenues mais sans solution.
"Ne t'inquiètes pas ma chérie le Père Noël est tellement débordé qu'il a dû les oublier
dans sa hotte, il va certainement les rapporter plus tard".
Après avoir recouché notre petite chérie qui était bien tristounette, toute la maisonnée
s'est mise à la recherche du cadeau manquant, ce fut le branle bat de combat dans toute la maison, toutes les pièces y sont passées !!!
Enfin, ouf les bottes étaient restées sous le lit de la mamie qui les avait cachées là
et ne s'en souvenait plus.
Le lendemain quand notre petite puce s'est réveillée, elle a trouvé ses belles bottes blanches sous le sapin et son sourire en même temps.
Claudine
claudineNicolas, enfin te revoilà, sa voix chevrotte, elle balbutie, : Nicolas, enfin toi, je suis si heureuse de te revoir. Elle enlace son fils de toute ses forces pour le sentir, le respirer, cela fait plus d’un an qu’il n’est pas rentré à la maison, L’année dernière, il n’avait pas pu venir pour Noël.
Le fils prodigue avance dans le couloir, pose son énorme sac sur roulette dans un coin et embrasse toute la famille appréciant le retour parmi les siens. Il ne dit presque rien, il écoute le chari vari de tout ce monde qui parle fort, des neveux qui chahutent en attendant l’ouverture des cadeaux et Spic le retriever qui joue dans les jambes des invités. Cela lui fait du bien.
Le repas est terminé depuis un moment, le café est prêt à servir et les coupes de champagne bien alignées sur la table de fête. Tout le monde attendait Nicolas pour enfin ouvrir les paquets multicolores placés sous le sapin en cachette des petits.. Tonton Georges avait emmené les garcons faire un tour dans la ville dix minutes pour voir si le Père Noël faisait sa tournée. La Maman- Mamie, la Tata, Papa- Papy se sont précipités dans la chambre interdite et descendu quatre à quatre les bras chargés recouvrir le tiers de la pièce de tous les cadeaux sous le sapin.
Et la suprise en rentrant, une montagne de cadeaux scintillait sous les guirlandes allumées.
Ainsi, voilà le moment fatidique de la distribution. Qui s’y colle ? Le plus grand des enfants bien sûr, il saura bien lire sur les étiquettes le nom du receveur du présent.
Et, les paquets, au fur et à mesure arrivent dans les mains des destinataires. On attend avant d’ouvrir.... Il faut que tout soit distribué. Alors, on entend : pour Félix, pour moi, pour Félix, pour moi, encore pour moi, et pour Félix . Le visage des enfants s’illuminent. Puis, viennent d’autres noms et chacun se retouve entouré de ses paquets , avide, impatient de les ouvrir.
Top départ, les rubans craquent, les papiers si brillants se fanent sous la fougue des mains tremblantes . Est-ce-que j’ai eu ce que j’ai commandé ou suggéré au Père Noël ?
Les Oh ! les Ah ! les sourires ,les rires et les mercis fusent de toute part.
Il n’y a que la Maman qui savoure en silence ce moment magique où elle observe sa petite famille heureuse à l’instant présent. Tout le travail et la préparation déployés pour cette soirée de partage sont infiniment bienfaiteurs pour le moral et pour le coeur..
L’arrivée de son grand fils , C’est cela son meilleur cadeau
ChristianeElle sonne au portail, on voit la petite maison au fond du jardin toute iluminèe, la porte s'ouvre la maîtresse de maison lui crie "c'est ouvert", elle a les bras couverts de paquets cadeaux c'est sa fille qui s'avance vers elle et qui la serre contre elle comme elle peut " que tu es belle maman, mais tu es bien chargèe!" Et elle sourit avec son beau visage rieur, " viens, entre ils sont tous là".La table est mise avec une nappe et des serviettes rouges, des bougies un peu partout, près de la cheminée allumée un immense sapin caché par une multitude de décorations, ils se lèvent et l'embrassent tour à tour avant qu'elle ne pose ses paquets sous le sapin " heureusement ils ne sont pas lourds", ils s'installent autour de la table, (le gendre, le fils,là grand mére et le mari qui étaient arrivés précédemment, que des bonnes choses à déguster ( foie gras, saumon fumé, chapon avec marrons et purée de brocolis, mélange de salades et copieux plateau de fromages et pour finir une bûche à la mousse de fruits)....le bouchon du champagne saute et tout le monde rie aux éclats.....un Noêl joyeux et chaleureux comme toujours....Chacun ouvre ses cadeaux, dommage c'etait beau cet amoncellement de couleurs prés du sapin, ils ont l'air tous contents...quoique....! On voit là grand mére tournant dans tous les sens un gilet jaune en laine épaisse, les sourcils en accent circonflexe et une petite moue sur les lèvres....sa fille sait: elle a horreur du jaune et des pulls en laine épaisse....mais elle lève les yeux et elle sourit de son sourire enjôleur qui n'égal à aucun autre....elle plie son précieux cadeau (LOL), elle sait à qui le transmettre ......sa fille adore le jaune et les pulls de laine épais.....Alors tout va bien dans le meilleur des mondes....on lui tends sa coupe de champagne qu'elle déguste doucement......Et l'expression de son visage semble dire: Quel dommage que Noêl n'existe qu'une fois dans l'année.....
josefaJe suis étudiant à Caen et je vis avec mon colocataire Arthur dans un petit logement, sympa, mais comme son nom l’indique « petit ». Caen est une jolie ville mais pendant le confinement elle oublie de vivre...comme moi...je travaille sur mon ordi...je mange...je dors...Et rebelote...je viens de la Réunion et naturellement je n’ai pas pu rentrer chez moi pour me confiner. Arthur lui est normand. Il a préféré rester près de la Fac pour pouvoir participer aux travaux pratiques. Pour Noël il m’a invité dans sa famille à Honfleur.
Toute la famille est réunie chez les grands- parents. Je ne connais personne mais je suis accueilli chaleureusement.
Le repas est délicieux. Les rires fusent, les enfants impatients se chamaillent. J’essaie de participer aux conversations. Comme à son habitude, Arthur s’est connecté à son smartphone. Il n’entend plus rien, il ne voit plus rien...sa grand- mère insiste: « Arthur que fais-tu?
Je lis Mamie.
Ah! C’est bien, mais tu vas t’abîmer les yeux!
T’inquiète. »
La grand-mère me jette un petit regard malicieux.
« Il est toujours comme ça?
Oh! Oui.
Il aime lire hein?
Oui! Oui!. »
Après le champagne, le grand- père annonce: « C’est Tata Juliette qui va distribuer les cadeaux. Mais, attention, on ouvre ses paquets quand tout le monde est servi. »
Les petits se sont assis autour du sapin, les grandes personnes ont rapproché leurs chaises, les jeunes, l’air désinvolte, continuent de chahuter. Ils ont passé l’âge d’attendre impatiemment « Les Cadeaux ».
Arthur est toujours scotché à son téléphone. Moi, un peu à l’écart, je pense à ma famille réunie sous le grand parasol près du sapin, dans le jardin, par cette douce soirée d’été à la Réunion .
Tata Juliette égrène les prénoms. Arthur a rangé son téléphone pour prendre un gros paquet enveloppé d’or et d’argent et plusieurs petites enveloppes. Ma boîte de chocolat sous le bras, je m’approche de lui pour assister à l’ouverture du gros paquet. Il me glisse: « C’est de la part de Papi et Mamie. » il arrache fiévreusement Bolduc, scotch et papier...À mon avis il espère le casque à réalité virtuelle...son rêve...son sourire s’efface bientôt...sa déception est visible...
beaucoup trop visible...Je jette un œil sur la Mamie...elle est accaparée par les bisous et les mercis. Arthur me montre son cadeau: c’est une pile de livres. Nous partons tous les deux d’un grand fou rire que nous allons cacher dans la cuisine.
« je pense que les petites enveloppes vont m’aider à réaliser quand même mon rêve » me dit Arthur, en claironnant : « Merci Papi et Mamie. »
Quand je vais remercier la grand- mère pour ce merveilleux Noël, elle me dit : « Tu as vu le cadeau d’Arthur? Il ne s’esquintera plus les yeux sur son téléphone maintenant. »
Au moment de partir, Arthur glisse discrètement ses livres dans mon sac à côté de mes cadeaux de Noël (chocolats, bonbons, chaussettes) en me disant: « en plus de tes « nourritures terrestres », voici tes « nourritures littéraires ».
Joyeux Noël
lucetteMonsieur Cadeau et lui, ça fait deux, c'est plutôt le genre de type que vous pouvez traîner devant la vitrine d'une bijouterie, à la Saint-Valentin, et vous extasier en vain devant la parure de vos rêves. Peine perdue, il vous offrira un robot performant aperçu au Salon des Arts Ménagers, en vous susurrant à l'oreille : « C'est pour toi, ma Chérie, je sais que tu en rêvais ». Parfois, j'ai eu des envies de meurtres. Mais c'est un bon mari et un père aimant, juste pas très imaginatif, un mec quoi, dirait ma fille, indulgente avec les faiblesses masculines.
heyliettD'un Noël, je me souviens en particulier. Comme à l'accoutumée, j'avais agité mes neurones et passé un temps fou à trouver pour chacun LE cadeau attendu, visité de multiples magasins dès le mois d'octobre et même commandé quelques présents sur le catalogue de la redoutable enseigne, avant son découpage par les plus jeunes.
La maison et le sapin décorés, le saumon mariné, la dinde enfournée, la bûche au réfrigérateur, la famille est prête pour se rendre à la messe avant de réveillonner. Les garçons arborent un nœud papillon, leur sœur une mini-jupe bien que son père ait tiqué. Il faudra attendre le retour et la fin du repas pour déballer les cadeaux et me préparer à recevoir un énième ustensile ménager, le dernier Goncourt ou le best-seller chaudement recommandé par le magazine « Lire ». Parfois il m'est venu à l'esprit que plutôt que m'être dirigée vers le droit social, j'aurais pu présenter le concours d'entrée au conservatoire d'art dramatique entraînée que j'étais à feindre le ravissement et cacher ma déception.
Mais cette année-là ma surprise fut grande quand notre plus jeune fils, préposé à la distribution des cadeaux, me tendit un petit paquet de la part de « Papa ». Impossible d'y cacher le moindre accessoire de cuisine, pas même une cuiller à café. De l'écrin déshabillé, je sortis une bague toute simple, une marquise en lapis-lazuli sertie d'éclats d'argent. Les larmes me sont venus aux yeux.
Plus de 20 ans après notre divorce, je la porte avec toujours autant de plaisir alors que j'ai fait don à mes fille et nièce des bijoux précieux reçus à des occasions plus solennelles.
Parfois la magie de Noël peut opérer avec un peu de cœur pour toucher celui des autres !
Paul affichait un sourire satisfait en accueillant ses invités. C’était son tour d’organiser cette fête familiale et c’est avec grand plaisir qu’il avait réuni sa famille : les enfants, les neveux et nièces et ses deux sœurs Elise et Marthe. Marthe, comme à son habitude était venue seule, vieille fille acariâtre, professeur de français à la retraite, on ne lui avait d’ailleurs jamais connu d’amoureux. Elise était arrivée accompagnée cette année, très fière de présenter sa nouvelle conquête : l’écrivain Henri Le Terrier, qui venait de recevoir le prix Goncourt. Paul exprima sa fierté de recevoir un tel hôte de marque. Marthe afficha un sourire admiratif qui surprit chacun, on ne connaissait d’elle, habituellement, que des grimaces de dédain.
CaroleChaque année, la règle était la même, chacun venait avec un cadeau qui serait attribué au hasard, la tradition serait donc respectée. Le buffet était copieux et ne comportait que des mets de choix, le champagne coulait à flot, échauffant les esprits et les conversations. Une seule personne parmi les invités détonnait, Marthe s’était isolée dans un coin du salon et scrutait chaque visage avec un air hautain. Le public ne lui semblait certainement pas à la hauteur de son intelligence.
A minuit, on sollicita la plus jeune des nièces pour distribuer les cadeaux. En observant le visage de chacun, on pouvait deviner l’effet que produisait chacun de ces présents anonymes. Un des neveux s’esclaffait en découvrant la dernière bande dessinée de Lucky Luke, Elise pâlissait à la vue de l’enveloppe qu’elle venait d’ouvrir : une invitation à assister au concert de Julien Doré qu’elle ne supportait pas. La petite Léa râlait en développant un mug décoré de la tête du Père Noël « C’est nul ! » répétait-elle. Mais chacun finalement finissait par remercier le donateur anonyme, respectant la trêve de Noel.
Marthe ne s’était pas approchée du sapin et n’avait donc rien reçu, or il n’y avait plus aucun paquet au pied de l’arbre. Elle jubilait intérieurement : « Ces imbéciles m’ont oubliée, comme d’habitude, je compte pour des prunes ! ». Elle eut un mouvement de recul lorsqu’Henri Le Terrier s’approcha d’elle un paquet à la main et lui tendit. Elise la fixait avec un regard goguenard qui ne lui disait rien qui vaille.
« - Quand j’ai appris que vous seriez là, je n’ai pas pu résister. Je tiens tellement à vous remercier après toutes ces années, je vous dois réellement ma passion de l’écriture »
Elle saisit le cadeau d’un air méfiant, scruta le visage de l’écrivain. Non, elle ne le reconnaissait pas. Elle déchira le papier qui enveloppait le roman qui lui avait valu le Goncourt, le titre en était « Piqué au vif ».
- Pfff, encore un roman de gare pensa-t-elle, elle qui n’aimait que Proust et Cioran. Du livre tomba une copie de lycéen, elle la saisit, blêmit… et s’évanouit, c’était ce qu’il y a avait de mieux à faire… En rouge figurait en entête du devoir de français cette infâme appréciation, écrite de sa main quarante ans plus tôt : « 4/20. Nul, Totalement hors sujet. Aucun respect pour la langue française que vous maltraitez. Rendez service à la littérature, pensez à vous orienter vers des études scientifiques.»…