Choisissez un souvenir fortement relié à une couleur : la couleur d’un objet, d’un lieu.

Et si l’inspiration ne vient pas, voici quelques propositions pour écrire des souvenirs fictifs : un seau de plage rouge, un pull rose, un ciel mauve, un chat roux, une porte verte…

 

 

Michel Pastoureau, à propos d’André Breton, les couleurs de nos souvenirs :

Si je n’ai pas gardé un souvenir précis de tous les dessins que Breton a faits devant moi, l’image que je conserve de sa personne, en revanche, est extrêmement nette. Elle présente trois particularités : un homme plus âgé que mon père, pourvu d’une énorme tête et vêtu d’un gilet jaune… ce qui reste le plus fortement ancré dans ma mémoire visuelle, c’est la couleur de cet inamovible gilet jaune, un jaune mat et chaud, presque sucré, dont je pourrais aujourd’hui encore, sans difficulté aucune, retrouver la teinte sur un nuancier. Il est peu probable que Breton ait jamais enlevé devant moi sa veste pour dîner, c’était chez lui un geste exceptionnel. Mais que pouvait bien être, au début des années 1950, un tel gilet qui a si fortement frappé le petit garçon que j’étais – quelles en étaient la matière et la couleur réelles ? Un paletot en cuir ? en peau ? en daim ? Un simple gilet de feutre ou de laine beige que ma mémoire a transformé en un habit couleur de miel ? Ou bien une pièce de vêtement excentrique, comme Breton en portait parfois – sur le pont du bateau qui l’emmenait vers l’Amérique, Claude Lévi-Strauss et d’autres l’ont vu déambuler dans un étrange « imperméable en éponge bleu ciel » –, et qui aurait été vraiment d’un jaune vif et chaleureux ? Je ne le saurai probablement jamais, les seules photographies conservées de cette époque étant en noir et blanc.