Je vous propose d’imaginer le meurtre que vous (votre personnage !) commettriez par exaspération, cupidité, passion… ?  Vous avez le choix des armes : fourchette, fer à repasser, hâche, écharpe de soie…

Pensez à y inclure les ingrédients précédents : chiffhanger, scène de crime « zoomée », Et surtout : le narrateur est l’assassin (récit en je) ! Votre héros n’a pas besoin d’être sympathique !

Imaginez… sur la terrasse d’une villa deauvillaise, un homme assis. Dans sa main gauche, un verre de whisky . Entre ses mains, un téléphone portable. Sera-t-il le meurtrier ? la victime ? le témoin ? A vous d’imaginer

Un exemple de meurtre délectable :

« Si je n’ai pas mes huit heures de sommeil je suis un homme perdu, et je devais me lever à sept heures… Il était deux heures et ils ne partaient pas, ils étaient vautrés dans les fauteuils, béats. Et Dieu sait que je n’avais pu faire autrement que de les inviter à dîner. Ils jacassaient comme des pies, ils caquetaient à n’en plus finir et se relançaient l’un à l’autre la conversation, ils l’emmêlaient de bredouillis et parlaient à tort et à travers de choses inutiles. Et je devais porter verres de cognac et autres tasses de café. Soudain il lui vint à l’idée, à elle, que nous pourrions prendre un peu plus tard une soupe à l’ail. (Ma cuisinière est très réputée.) Je n’en pouvais plus. Je les avais invités à dîner parce que je ne pouvais faire autrement, parce que je suis bien élevé. Ils étaient arrivés plus ou moins à neuf heures et demie, il était deux heures du matin et ils ne semblaient pas vouloir s’en aller. Je ne pouvais chasser la pendule de ma pensée, parce que je ne pouvais y jeter un œil, car, au-delà de tout : je suis bien élevé. Je devais me lever à sept heures et si je ne dors pas mes huit heures je suis une loque toute la journée, et de surcroît ce qu’ils racontaient ne m’intéressait pas, absolument pas. Bien entendu j’aurais pu agir comme un être grossier et d’une façon ou d’une autre leur dire de s’en aller. Mais ce n’est pas dans ma manière. Ma mère qui fut veuve très jeune m’a inculqué les meilleurs principes. Je n’avais qu’une seule envie : dormir, et le reste m’importait peu. Je n’avais pourtant pas tellement sommeil, je pensais seulement à l’envie que j’en aurais le lendemain… Mon éducation m’empêchait de simuler ces bâillements qui sont le moyen habituel des personnes ordinaires. Et vous par-ci et vous par-là… et ça et le reste. Le gin-rummy, les échecs, le poker… Ginger Rogers, Lana Turner, Dolores del Rio (je déteste le cinéma). Le samedi à Cuernavaca (je déteste Cuernavaca). Ah ! la maison d’Acapulco ! (à ce moment-là je détestais aussi Acapulco)… et Mengano qui perdait et perdait… Et vous, qu’en pensez-vous ? Et vous, et vous et vous… Et le Président, et le ministre, et l’opéra (je déteste l’opéra). Et le cashmere anglais, Don Pedro, et le gazon, les choux… Et ce poison qui ressemblait tellement au cognac. »

 

tiré de Max Aub, Crimes exemplaires